03 JUIN 2017

24 images - Éric Fourlanty: Tetro

" Tetro est un drame familial. Quelle famille? Celle de Coppola, bien sûr (« Ce film n'est pas autobiographique, mais tout est vrai » a-t-il déclaré à Cannes), mais aussi toutes les autres. LA famille comme source de toute histoire. Le sujet n'est pas nouveau pour celui qui a déjà dit que The Godfather était le family home movie le plus cher au monde. Ajoutez-y la création, l'ambition, la trahison et vous avez les lignes de force de l'univers Coppola, en lien direct avec la mythologie grecque, via la Sicile et le Nouveau Monde. D'entrée de jeu, le cinéaste s'éloigne des conventions – réalisme de téléréalité, logique des rebondissements, explications psychologisantes – qui gangrènent 90% du cinéma américain (y compris indépendant). Images de générique quasi-abstraites, lieux filmés comme sur une scène de théâtre, clairs-obscurs expressionnistes, personnages emblématiques (Carmen Maura en critique toute-puissante): nous sommes dans le mythe, l'opéra, le conte. Mais pour un film dans lequel un écrivain dit que le langage est mort, il y a beaucoup (trop?) de mots dans Tetro. Peut-être est-ce là le moyen pour Coppola de faire la preuve par l'absurde que le cinéma, c'est d'abord de la lumière qui parle? Et la sienne est superbe. On dirait du cinéma muet filmé avec du son. Les acteurs ne sont pas en reste. Avec sa gueule à la Antonin Artaud, Gallo a l'intensité lunaire d'une Falconetti, Alden Ehrenreich est parfait en émule de l'Actor's Studio, et Maribel Verdú, comédienne talentueuse, joue en surface comme dans une télénovela : trois façons de jouer, trois époques du jeu que le cinéaste met en parallèle : la proposition est séduisante, le résultat l'est moins. Bien que, d'un point de vue de spectateur, « l'expérience » Tetro ne soit pas aussi jouissive, satisfaisante, aboutie que celles vécues grâce aux meilleurs Coppola, on ne peut que s'incliner devant le goût du risque et de l'exploration d'un cinéaste qui, à 70 ans, prend encore le cinéma à bras-le-corps comme un jeune homme."

" Tetro est un drame familial. Quelle famille? Celle de Coppola, bien sûr (« Ce film n'est pas autobiographique, mais tout est vrai » a-t-il déclaré à Cannes), mais aussi toutes les autres. LA famille comme source de toute histoire. Le sujet n'est pas nouveau pour celui qui a déjà dit que The Godfather était le family home movie le plus cher au monde. Ajoutez-y la création, l'ambition, la trahison et vous avez les lignes de force de l'univers Coppola, en lien direct avec la mythologie grecque, via la Sicile et le Nouveau Monde.     D'entrée de jeu, le cinéaste s'éloigne des conventions – réalisme de téléréalité, logique des rebondissements, explications psychologisantes – qui gangrènent 90% du cinéma américain (y compris indépendant). Images de générique quasi-abstraites, lieux filmés comme sur une scène de théâtre, clairs-obscurs expressionnistes, personnages emblématiques (Carmen Maura en critique toute-puissante): nous sommes dans le mythe,  l'opéra, le conte. Mais pour un film dans lequel un écrivain dit que le langage est mort, il y a beaucoup (trop?) de mots dans Tetro.  Peut-être est-ce là le moyen pour Coppola de faire la preuve par l'absurde que le cinéma, c'est d'abord de la lumière qui parle? Et la sienne est superbe. On dirait du cinéma muet filmé avec du son. Les acteurs ne sont pas en reste. Avec sa gueule à la Antonin Artaud, Gallo a l'intensité lunaire d'une Falconetti, Alden Ehrenreich est parfait en émule de l'Actor's Studio, et Maribel Verdú, comédienne talentueuse, joue en surface comme dans une télénovela : trois façons de jouer, trois époques du jeu que le cinéaste met en parallèle : la proposition est séduisante, le résultat l'est moins.

Bien que, d'un point de vue de spectateur, « l'expérience » Tetro ne soit pas aussi jouissive, satisfaisante, aboutie que celles vécues grâce aux meilleurs Coppola, on ne peut que s'incliner devant le goût du risque et de l'exploration d'un cinéaste qui, à 70 ans, prend encore le cinéma à bras-le-corps comme un jeune homme."