28 FÉVRIER 2011

Anne Wiazemsky : "Les œuvres nous ressemblent"

Ecrivain (mais aussi actrice chez Bresson, Godard, dont elle fut la femme, Garrel, Téchiné...), Anne Wiazemsky a publié "Je m'appelle Elizabeth" en 2004, qui a été adapté deux ans plus tard par Jean-Pierre Améris. Elle raconte...

"En juin 2002, au cours d’une soirée, une amie très chère que je croyais jusque-là bien connaître, me raconta soudain, en quelques mots, un épisode presque secret de son enfance : petite fille, elle avait durant trois jours caché un malade mental, “un fou”, évadé de l’asile psychiatrique que dirigeait son père. Cette brève évocation me bouleversa et le lendemain matin je l’appelai pour lui demander si elle “me donnait son histoire”. Généreuse, elle accepta en précisant qu’elle ne se souvenait guère des détails et que je devais me débrouiller toute seule.

J’écrivis alors en peu de temps et avec beaucoup de liberté le roman de Betty qui allait devenir Elisabeth. C’était l’histoire de mon amie, ce n’était pas la mienne, mais sans doute une partie obscure de moi en profita pour s’y nicher.

Ce livre est devenu le film de Jean-Pierre Améris, à la fois fidèle et infidèle, très personnel et qui lui ressemble comme me ressemble aussi mon roman. Moi et lui, chacun à notre tour, avons éprouvé le besoin de s’approprier Betty, de la réinventer. Maintenant, elle a le visage désormais inoubliable de celle qui l’interprète : Alba-Gaïa Kraghede Bellugi. Cette petite fille qui va vivre sur les écrans a-t-elle encore un rapport avec la première petite fille, celle de jadis, mon amie ?"

Anne Wiazemsky