28 FÉVRIER 2011

De Calabre à Marseille, trois générations...

Comment Robert Guédiguian a posé les bases de son univers : en filmant ses proches, et en racontant à son tour, comme le faisaient ses voisins, ses parents... les petites histoires de chacun, précipitées dans le cours de l'Histoire.

Déjà présent dans Dernier été, le couple Ariane Ascaride-Gérard Meylan se reforme ici pour devenir une des «figures» récurrentes du cinéma de Guédiguian. Sans trop pouvoir expliquer pourquoi, celui-ci a toujours pensé que son ami d’enfance Gérard Meylan (devenu infirmier) ferait un acteur formidable : «Comme une boutade, en voyant le titre «Rouge Midi» dans un journal, je lui avais même dit : ce serait super pour un film, je le réaliserais et tu jouerais le rôle principal !». Mais c’était à une époque où le cinéma ne faisait pas du tout partie de ses préoccupations. Il aura fallu la rencontre avec une étudiante nommée Ariane Ascaride, le départ à Paris pour la rejoindre alors qu’elle étudiait au Conservatoire National d’Art Dramatique et la rencontre avec plusieurs fondus de cinéma. Lorsqu’il s’est mis à écrire, Robert Guédiguian s’est tout de suite souvenu des récits qu’il entendait lorsqu’il était enfant. Dans ce quartier de l’Estaque où il habitait avec ses parents et qu’il a si souvent filmé depuis, il passait des heures le soir à écouter ses voisins se raconter. L’une des voisines s’appelait Maggiorina, comme le personnage interprété par Ariane Ascaride dans Rouge Midi, et elle avait émigré de Calabre à Marseille avec ses parents dans les années 20… Il y avait aussi Jules et ses tatouages de femmes nues et Albin, l’instituteur communiste… Tissant ensemble les bribes de leurs vies,  le réalisateur a recréé trois générations de Marseillais, venus d’ici et d’ailleurs, et dont la petite histoire se mêle à la grande –la guerre, le front populaire...– dans une fresque en costume à la fois naïve et ambitieuse.

Isabelle Danel