28 FÉVRIER 2011

Faux village, vraie Provence...

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Espigoule sans jamais oser le demander... En filmant ses amis d'enfance dans leur quotidien, comme en recréant les saynètes de leurs délires, Christian Philibert s'est fait le documentariste d'un village provençal plus vrai que nature : Espigoule. Un village qui n'existe pas. Entièrement inventé, certes, mais d'après la stricte vérité !

Christian Philibert : " Au départ, une idée simple : prendre le spectateur par la main pour l'entraîner au coeur d'Espigoule et lui faire partager le quotidien de ce village pendant quatre saisons.Dix ans de recherche pour tenter d'atteindre un naturel, une authenticité : celle du verbe, de l'accent, de la gestuelle ; leur sens de l'humour et de l'autodérision... Avec le soutien de mes amis d'enfance, acteurs de leur propre rôle, et grâce à leur complicité, j'ai travesti mon village pour le transformer en un monde imaginaire : Espigoule. "." ...Oui ce village existe; il a l'esprit sagace De ceux dont le courage est devant une glace, D'accepter ce qu'ils sont sans se voiler la face Et de rire d'eux-mêmes avant qu'on ne le fasse. " Dans les guides touristiques consacrés à la Provence, on peut lire : Espigoule, village du Haut-Var, groupé sur un petit promontoire, sans caractère excessif mais qui jouit d'une parfaite tranquillité. Entre collines et autoroute, c'est un village qui sent bon la lavande et la pétoule de mouton. Un peu isolé du fait de sa situation géographique mais pas très éloigné des grands axes touristiques et économiques, Espigoule a su éviter l'abîme de la désertification et le piège de l'urbanisation excessive. Sa population est même d'une étonnante stabilité qui défie les lois de la démographie. On comptait 733 âmes au moment de la Révolution, 731 à la fin du XIXe siècle et aujourd'hui 732. La plupart des Espigoulais sont agriculteurs, commerçants ou fonctionnaires sur place ou dans les villes les plus proches, Aix-en-Provence, Manosque ou Pinchon, le village voisin, qui, avec ses 3000 habitants, sa gendarmerie et sa supérette, est considéré par les Espigoulais comme une ville. Des querelles ancestrales séparent (ou unissent, on ne sait pas trop) les Pinchonnais et les Espigoulais. Rivalités de clocher dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Berceau du brigandage à la fin du XVIIIe siècle, Espigoule comptait alors plus de bandits que d'habitants. Le Saint Patron d'Espigoule est Saint-Joseph de Blacas. En 1720, alors que la peste se rapprochait du village, le père Joseph, curé de la paroisse, monta sur le toit de l'église et, tel son modèle Monseigneur Belsunce, Évêque de Marseille, il l'exorcisa aux quatre vents. La peste n'arriva jamais à Espigoule mais le Père Joseph tomba du clocher. Seule victime espigoulaise de l'épidémie, il fut canonisé en 1837, sous la pression des fidèles qui, selon la tradition, allèrent eux-mêmes à Rome forcer la main au Pape. Depuis, les temps ont bien changés, comme en témoignent les W-C publics qui furent édifiés contre les murs de l'église, au moment du Front Populaire, selon l'expression du maire d'alors : pour faire chier le curé. Malgré tout, la fête votive de la Saint-Joseph a bien lieu tous les ans le dernier week-end du mois d'Août à Espigoule.