03 JUIN 2017

Les Inrockuptibles - Jean-Marc Lalanne: La France

"... le film opère un étonnant renversement dans l’ordre habituel des scénarios de travestissement. Le scénario du doute et de la suspicion ne porte plus sur l’identité de Camille, mais sur celle de cet étrange régiment au protocole bizarre, dont on ne sait pas très bien ce qui meut son déplacement. Si la jeune femme ne perd jamais le fil de sa quête (revoir son mari), quelque chose se déplace. L’expérience du groupe la projette dans un espace parallèle, où les questions de l’identité, de la différence, du particularisme biographique deviennent toutes relatives. Le cinéaste Bozon excelle à filmer la troupe, le groupe humain, la façon dont chacun trouve son poste par rapport à un ensemble, et c’est de la façon la plus logique et naturelle du monde que cette harmonie collective porte ce régiment à se métamorphoser régulièrement en petit orchestre, troubadours psychédéliques chantant des comptines aux quatre vents du champ de bataille. Ces chansons se terminent toutes par une même interrogation plaintive : “Est-ce qu’il viendra vers moi ?”, ad libitum. La fin du film (on ne la révélera pas) répond à la question. Qui viendra vers qui ? On sait qu’au cinéma, depuis Murnau (Nosferatu, 1922), passé les ponts (et ici, on en passe, on s’y jette même), ce sont le plus souvent des fantômes qui viennent à notre rencontre."

"... le film opère un étonnant renversement dans l’ordre habituel des scénarios de travestissement. Le scénario du doute et de la suspicion ne porte plus sur l’identité de Camille, mais sur celle de cet étrange régiment au protocole bizarre, dont on ne sait pas très bien ce qui meut son déplacement. Si la jeune femme ne perd jamais le fil de sa quête (revoir son mari), quelque chose se déplace. L’expérience du groupe la projette dans un espace parallèle, où les questions de l’identité, de la différence, du particularisme biographique deviennent toutes relatives. Le cinéaste Bozon excelle à filmer la troupe, le groupe humain, la façon dont chacun trouve son poste par rapport à un ensemble, et c’est de la façon la plus logique et naturelle du monde que cette harmonie collective porte ce régiment à se métamorphoser régulièrement en petit orchestre, troubadours psychédéliques chantant des comptines aux quatre vents du champ de bataille. Ces chansons se terminent toutes par une même interrogation plaintive : “Est-ce qu’il viendra vers moi ?”, ad libitum. La fin du film (on ne la révélera pas) répond à la question. Qui viendra vers qui ? On sait qu’au cinéma, depuis Murnau (Nosferatu, 1922), passé les ponts (et ici, on en passe, on s’y jette même), ce sont le plus souvent des fantômes qui viennent à notre rencontre."