03 JUIN 2017

Les Inrockuptibles - Léo Soesanto: Bovines ou la vraie vie des vaches

" Si un film avec Billy Crystal n’avait pas chipé l’idée le premier, Bovines aurait pu s’appeler La Vie, l’amour… les vaches. Tout est dit : le programme presque insensé d’un documentaire suivant au jour le jour un troupeau de charolaises meuglant, broutant et prenant le soleil. Insensé, car ici on ne mâche pas le travail du spectateur : sont bannis le storytelling (ni bonne ni méchante vache, on est entre herbivores), la photogénie, les ralentis qui assènent que la vie des bêtes est magnifique, les musiques lénifiantes et les commentaires au coin du feu d’André Dussollier. Ainsi dégraissé, le spectacle de Bovines tient du pur trip. Sans les caméras-microscopes de Microcosmos mais avec beaucoup de patience, le moindre détail de la vie au grand air prend un sens poétique et cosmique : l’œil bovin forme une galaxie, la mise bas d’un veau y est tranquille et un sac en plastique flottant devient un mystérieux émissaire pour nos stoïques colocataires. Le temps des vaches se suspend mais est aussi compté : Bovines doit s’arracher au bonheur dans le pré pour tenir compte de la présence traumatique de l’homme. Alors que le film exorcisait avec force le démon de l’anthropomorphisme à la Disney, on n’est pas loin de Bambi lorsque survient l’éleveur. Qui réduit vite les bêtes à leur condition de steak. A Thousand Years, l’œuvre de Damien Hirst, consistait en une tête de vache sous vitrine, rongée en live par des vers et mouches. Spectacle cru pour rappeler le cycle de la vie, comme disent les docus du National Geographic. Bovines en est l’heureux pendant zen, sensoriel et regardable. Où le spectateur, lui aussi parqué avec d’autres spécimens dans une salle obscure, se sent proche et presque envieux de ces grosses glaneuses de petits riens."

" Si un film avec Billy Crystal n’avait pas chipé l’idée le premier, Bovines aurait pu s’appeler La Vie, l’amour… les vaches. Tout est dit : le programme presque insensé d’un documentaire suivant au jour le jour un troupeau de charolaises meuglant, broutant et prenant le soleil.

Insensé, car ici on ne mâche pas le travail du spectateur : sont bannis le storytelling (ni bonne ni méchante vache, on est entre herbivores), la photogénie, les ralentis qui assènent que la vie des bêtes est magnifique, les musiques lénifiantes et les commentaires au coin du feu d’André Dussollier.

Ainsi dégraissé, le spectacle de Bovines tient du pur trip. Sans les caméras-microscopes de Microcosmos mais avec beaucoup de patience, le moindre détail de la vie au grand air prend un sens poétique et cosmique : l’œil bovin forme une galaxie, la mise bas d’un veau y est tranquille et un sac en plastique flottant devient un mystérieux émissaire pour nos stoïques colocataires.

Le temps des vaches se suspend mais est aussi compté : Bovines doit s’arracher au bonheur dans le pré pour tenir compte de la présence traumatique de l’homme.

Alors que le film exorcisait avec force le démon de l’anthropomorphisme à la Disney, on n’est pas loin de Bambi lorsque survient l’éleveur. Qui réduit vite les bêtes à leur condition de steak.

A Thousand Years, l’œuvre de Damien Hirst, consistait en une tête de vache sous vitrine, rongée en live par des vers et mouches. Spectacle cru pour rappeler le cycle de la vie, comme disent les docus du National Geographic.

Bovines en est l’heureux pendant zen, sensoriel et regardable. Où le spectateur, lui aussi parqué avec d’autres spécimens dans une salle obscure, se sent proche et presque envieux de ces grosses glaneuses de petits riens."