03 JUIN 2017

Libération - Gérard Lefort: Henri

" Henri est un film sur la bonté. Pas celle qui glisse la pièce au pauvre monde et puis oublie. Non, la bonté de fond, discrète et invisible, telle qu’elle peut trouver asile dans un bar-restaurant des environs de Charleroi. (...) C’était le danger le plus féroce : s’approcher des handicapés mentaux avec toutes les pincettes de l’ethnologie moqueuse ou, pire encore, avec les Kleenex de la compassion à deux balles. Toutes les scènes dans le foyer dit des Papillons blancs sont une leçon de maintien : en groupe au réfectoire, ou en solo dans la chambre que Rosette partage avec une copine accro au tricot, la vision est empathique mais jamais hystérique. Ainsi de ce début d’insurrection des pensionnaires qui, suite à une vanne porno, se mettent à frapper sur les tables avec leurs couverts en hurlant «Du cul ! Du cul !» Il ne s’agit pas de reprendre en chœur (quoique…) mais de saisir que la mignardise n’est pas le genre de madame Moreau. Le grincement est la bande-son de ce film mal pensant. Ainsi de l’idylle entre Henri et Rosette, à la fois fatale et intempestive. Qui sait comment elle se terminera, quand Rosette traite (à juste titre) Henri de connard quand il argue de ses problèmes de santé pour ne pas conclure ? Et cette même Rosette qui n’est pas une sainte : calculatrice, elle est arc-boutée sur son désir d’être normale, ce qui, comme chacun sait, est une folie. Superbe séquence où Rosette s’hallucine en mariée dans les voiles d’un rideau. Une scène dans la cuisine du resto insiste sur la préparation des œufs mayo. C’est un détail qui dit tout. Henri est un film fait maison."

" Henri est un film sur la bonté. Pas celle qui glisse la pièce au pauvre monde et puis oublie. Non, la bonté de fond, discrète et invisible, telle qu’elle peut trouver asile dans un bar-restaurant des environs de Charleroi. (...)

C’était le danger le plus féroce : s’approcher des handicapés mentaux avec toutes les pincettes de l’ethnologie moqueuse ou, pire encore, avec les Kleenex de la compassion à deux balles. Toutes les scènes dans le foyer dit des Papillons blancs sont une leçon de maintien : en groupe au réfectoire, ou en solo dans la chambre que Rosette partage avec une copine accro au tricot, la vision est empathique mais jamais hystérique. Ainsi de ce début d’insurrection des pensionnaires qui, suite à une vanne porno, se mettent à frapper sur les tables avec leurs couverts en hurlant «Du cul ! Du cul !» Il ne s’agit pas de reprendre en chœur (quoique…) mais de saisir que la mignardise n’est pas le genre de madame Moreau.

Le grincement est la bande-son de ce film mal pensant. Ainsi de l’idylle entre Henri et Rosette, à la fois fatale et intempestive. Qui sait comment elle se terminera, quand Rosette traite (à juste titre) Henri de connard quand il argue de ses problèmes de santé pour ne pas conclure ? Et cette même Rosette qui n’est pas une sainte : calculatrice, elle est arc-boutée sur son désir d’être normale, ce qui, comme chacun sait, est une folie. Superbe séquence où Rosette s’hallucine en mariée dans les voiles d’un rideau.

Une scène dans la cuisine du resto insiste sur la préparation des œufs mayo. C’est un détail qui dit tout. Henri est un film fait maison."