06 MAI 2021

Maroni - Le territoire des ombres - Saison 2 - “Un conte gothique hanté par les morts”

Après une première saison en Guyane, Olivier Abbou (Territoires, Furie) poursuit l’aventure "Maroni" avec Stéphane Caillard dans une nouvelle contrée, affirmant son goût pour le polar noir, teinté de mysticisme.

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Qu’est-ce qui a conduit l’équipe de cette deuxième saison à Saint-Pierre-et-Miquelon ?

Olivier Abbou : « Maroni » propose de voyager dans des territoires souvent délaissés, voire ignorés, de notre pays. La saison 1 explorait la Guyane en remontant aux origines d’un peuple et d’une culture par le biais d’une intrigue policière. Situer cette nouvelle saison à Saint-Pierreet-Miquelon était une manière de creuser ce qui fait l’identité de la série, sans se répéter. Au cœur de ce voyage, il y a le thème de l’insularité. Les Saint-Pierrais affirment une identité forte et une certaine défiance vis-à-vis de la métropole. Ils appellent leur île la “Corse froide” et préfèrent souvent régler leurs problèmes entre eux, ce qui est intéressant sur le plan dramatique. Par ailleurs, c’est une communauté très attachante qui nous a accueillis les bras ouverts.

 

En quoi ce nouveau décor a-t-il influencé votre approche ?

Olivier Abbou : Je voulais tourner en hiver, pour marquer un contraste fort avec la première saison. Le soleil ne se lève jamais vraiment : on est entre chien et loup du matin au soir, dans le brouillard ou la neige. Cette atmosphère permettait d’accentuer la dimension de conte, en amenant d’emblée le spectateur vers une lecture symbolique de l’histoire. C’est toute l’importance de l’arrière-plan historique et culturel de cette région, dont témoigne la mémoire du peuple béothuk, qui vivait là avant l’arrivée des colons. Après un long travail de documentation avec les scénaristes Camille Lugan, Angelo Cianci et Jean-Charles Paugam, j’ai effectué un séjour sur place qui a beaucoup compté dans notre tentative de capter “l’esprit” des lieux. Cette saison 2 est un conte gothique hanté par les morts, qui pose cette question : peut-on apprendre à vivre avec ses fantômes ?

 

La série ne donne-t-elle pas aussi à voir l’émergence d’une héroïne ?

Olivier Abbou : Il nous semblait que le personnage de Chloé avait encore beaucoup à dire. Au-delà de l’intrigue policière, nous avons abordé le récit comme un drame émotionnel. Chloé vit un double deuil, en même temps qu’un retour sur un territoire qu’elle a fui. L’enjeu principal était de refléter son intériorité. Les personnages féminins s’avèrent les plus importants dans cette saison, que ce soit la marraine locale jouée par Brigitte Sy, la mère de Chloé, ou une mystérieuse jeune femme autochtone. Nous voulions aussi parler de ce qui se passe au Canada dans les réserves, où les violences dirigées contre les femmes et les disparitions sont fréquentes. Aborder ce sujet à travers ces portraits de femmes fortes est une fierté.

 

Propos recueillis par Jonathan Lennuyeux-Comnène