28 FÉVRIER 2011

"Sautet commentant Sautet, avec ses silences, son humour et ses colères"

Critique de cinéma à la revue "Positif", N.T.Binh s'est entretenu longuement avec le réalisateur au crépuscule de sa vie puis lui a consacré ce documentaire où la voix du cinéaste, et les témoignages de ses proches finissent par dresser le formidable portrait d'un créateur au travail.

Claude Sautet ou la magie invisible a été présenté en Sélection officielle, hors-compétition au Festival de Cannes 2003. Son réalisateur, N.T.Binh, est aussi critique à la revue Positif et distributeur de films, principalement des classiques de l'histoire du cinéma, dont certains Lubitsch, cinéaste à qui il a consacré un formidable petit livre aux éditions Rivages, lequel fait désormais référence. Ses rencontres et ses entretiens avec Claude Sautet ont donné lieu à ce passionnant documentaire et à un beau livre, édité par La Martinière. Il raconte :

« Au début de l'an 2000, lorsque j'ai approché Claude Sautet pour réaliser un documentaire sur sa carrière (...), il était déjà gravement malade. Il a accepté de nous recevoir, mon complice Dominique Rabourdin et moi, pour une longue série d'entretiens sonores, mais ne désirait pas être filmé. "Plus tard, quand j'irai mieux... ", disait-il sans beaucoup d'illusions". Les derniers entretiens avec Sautet ont eu lieu quelques jours seulement avant sa disparition.

Il connaissait chaque image de ses films par coeur et a accepté de commenter certaines de ses séquences les plus célèbres ; nous lui avons laissé faire toutes les digressions qu'il voulait. Nous avons aussi respecté ses silences et ses hésitations, sans jamais l'interrompre. C'est alors qu'oubliant le micro, il s'est  presque inconsciemment livré, bien plus qu'il ne l'avait jamais fait auparavant, avec son humour et ses colères, son obstination et ses doutes, laissant apparaître l'essentiel : l'interaction entre ses sentiments les plus personnels et la matière de ses films.

Mon souhait le plus cher est qu'après avoir écouté Claude Sautet commentant son oeuvre, et s'être replongé dans les images qu'il a tournées, le spectateur n'ait plus qu'une idée : se précipiter dans une salle ou sur un DVD pour revoir ses films avec un oeil neuf… »