Télérama - Claude-Marie Trémois: L'Odeur de la papaye verte
" Les exilés gardent leur pays incrusté si profondément en eux qu'ils peuvent le recréer dans n'importe quel coin du monde. Pour son premier film, Tran Anh Hung a reconstruit, dans les studios de Bry-sur-Marne, une rue de Saïgon et une grande maison verte aux portes coulissantes, dans la cour de laquelle pousse un papayer. Et c'est hallucinant de vérité. Dès la première image une petite fille, dans la nuit, sous la pluie, cherche une maison qu'elle ne connaît pas , on sent la moiteur et la touffeur. Nous sommes en Extrême-Orient, et c'est tout juste si n'affleurera pas, tout à l'heure, l'odeur de la papaye verte. (...) Par les yeux de la petite Mui, entrée comme servante à l'âge de 10 ans, nous allons regarder vivre une famille de trois enfants et en découvrir peu à peu le secret. Un regard, ça se promène. Tran Anh Hung promène donc sa caméra au ras des choses et des gens en de longs travellings latéraux. Et c'est beau même si, parfois, une maladresse change la poésie en procédé. C'est beau, parce que ces lents travellings nous laissent le temps de nous imprégner d'une civilisation qui n'est pas la nôtre. C'est beau, surtout, parce qu'ils dessinent les chemins de la mémoire. L'histoire sans histoires de cette petite servante n'a rien à voir, apparemment, avec celle de Tran Anh Hung. Pourtant, l'émotion qui passe, discrètement, dans un plan, dans un geste, remonte, c'est sûr, du plus profond de ses souvenirs. Et la séparation, dix ans plus tard, de la petite servante et de sa maîtresse qu'elle aimait comme sa mère n'est-elle pas l'image de l'exil vécu par le réalisateur, loin de la mère patrie ?"
" Les exilés gardent leur pays incrusté si profondément en eux qu'ils peuvent le recréer dans n'importe quel coin du monde. Pour son premier film, Tran Anh Hung a reconstruit, dans les studios de Bry-sur-Marne, une rue de Saïgon et une grande maison verte aux portes coulissantes, dans la cour de laquelle pousse un papayer. Et c'est hallucinant de vérité. Dès la première image une petite fille, dans la nuit, sous la pluie, cherche une maison qu'elle ne connaît pas , on sent la moiteur et la touffeur. Nous sommes en Extrême-Orient, et c'est tout juste si n'affleurera pas, tout à l'heure, l'odeur de la papaye verte. (...)
Par les yeux de la petite Mui, entrée comme servante à l'âge de 10 ans, nous allons regarder vivre une famille de trois enfants et en découvrir peu à peu le secret.
Un regard, ça se promène. Tran Anh Hung promène donc sa caméra au ras des choses et des gens en de longs travellings latéraux. Et c'est beau même si, parfois, une maladresse change la poésie en procédé. C'est beau, parce que ces lents travellings nous laissent le temps de nous imprégner d'une civilisation qui n'est pas la nôtre. C'est beau, surtout, parce qu'ils dessinent les chemins de la mémoire. L'histoire sans histoires de cette petite servante n'a rien à voir, apparemment, avec celle de Tran Anh Hung. Pourtant, l'émotion qui passe, discrètement, dans un plan, dans un geste, remonte, c'est sûr, du plus profond de ses souvenirs. Et la séparation, dix ans plus tard, de la petite servante et de sa maîtresse qu'elle aimait comme sa mère n'est-elle pas l'image de l'exil vécu par le réalisateur, loin de la mère patrie ?"