Trois femmes rwandaises, victimes de viol de soldats français pendant le génocide en 1994, brisent le silence.
 
L'horreur, au-delà de l'imaginable. Elles s'appellent Prisca, Marie-Jeanne, Concessa... Tutsi, elles racontent, face caméra, leur quotidien dans les camps de réfugiés de Murambi et Nyarushishi. "Ils nous appelaient : 'Tutsi ! Tutsi !' Ils te sortaient de la tente et faisaient de toi ce qu'ils voulaient." "Ils", ce sont les soldats français de l'opération Turquoise, ceux-là mêmes qui, sous mandat de l'ONU, devaient les protéger, mais "réalisaient tous leurs fantasmes" à la nuit tombée. Toutes décrivent le même rituel : l'enlèvement dans leur tente, les viols en réunion, les photos prises par les militaires, encore et encore. "On pensait naïvement que le Blanc était un sauveur, qu'il apporterait la paix", soupire l'une de ces femmes. Si elles ont déjà brisé le silence en 2009 et 2012, allant jusqu'à Paris pour déposer plainte devant la justice française, l'instruction reste aujourd’hui au point mort.

Poids du silence 
Jamais encore leur parole n'avait été entendue. Coréalisé par l'auteur et musicien franco-rwandais Gaël Faye et le réalisateur Michael Sztanke ("Rwanda, chronique d'un génocide annoncé"), ce film la recueille pour la première fois avec pudeur. Il s'intéresse aussi à ce que ces femmes ont subi durant le génocide et à leur vie d'après. Ensemble, elles retournent sur les lieux de l'horreur. Distillés avec délicatesse, les textes poétiques de Gaël Faye donnent un émouvant écho à leurs témoignages. D’une grande sobriété, ce film, qui traite aussi de la transmission, de l'indicible et du poids du silence, est porteur d'une forte charge émotionnelle. Comme l’énonce l'écrivain Boubacar Boris Diop dès les premières secondes : "Ce qui s'est passé au Rwanda est, que cela vous plaise ou non, un moment de l'histoire de France".

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