Tout au long de leur vie, le "Tigre" et le peintre furent liés par une indéfectible amitié, à l’origine du legs de la série des Nymphéas à l’État français. Un beau film sur l’art, la politique et l’aube chaotique du XXe siècle.
 
Leur rencontre remonte à leurs jeunes années sous le Second Empire. Georges Clemenceau, le futur tribun, se destine alors à la médecine ; Claude Monet, le solitaire contemplatif, à la peinture. Le premier lutte pour une république sociale, le second œuvre à une rupture avec l’académisme artistique. Ils se reconnaissent, se perdent de vue puis se retrouvent pour ne plus se quitter, au crépuscule du XIXe siècle. Alors que Monet, installé à Giverny, veille sur son cher jardin – petite utopie dans la modernité pressée –, Clemenceau, entre sa vie politique à éclipses et son journal, La justice, s’extasie de la "révolution sans coup de fusil" que son ami est en train d'accomplir. Le moustachu à l’humour ravageur et le barbu à la poésie rêveuse partagent en outre une même passion pour l’art japonais et l’automobile.
 
L’affaire Dreyfus, dans laquelle ils s’engagent, les rapproche encore davantage. Ils s’écrivent, bien et beaucoup. Mais les cieux diaphanes de Monet s’obscurcissent dans le chaos de la Grande Guerre, qui verra le "Tigre" consacré en 1918 "Père la Victoire". Pour célébrer la paix retrouvée, le peintre veut offrir à la France et à son vieux complice, désormais président du Conseil, la série de tableaux sur laquelle il travaille avec acharnement, Les nymphéas. Touché, l’homme d’État fera installer ces panneaux monumentaux dans un écrin conçu pour eux, le musée de l’Orangerie. Les larmes aux yeux, c’est lui qui l’inaugurera en 1927, sans son ami, disparu quelques mois plus tôt.


Au fil de leur tendre et drolatique correspondance et de précieuses archives, dont les seules images filmées (par Sacha Guitry) de Monet, ce film retrace avec élégance le destin parallèle et la profonde amitié de ces deux géants. Au-delà du chef-d’œuvre de l’art moderne qu'ils ont légué ensemble au public, leurs quêtes respectives, artistique et politique, auront marqué le siècle précédent.

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Critique (1)

Le Monde - Antoine Flandrin : Clémenceau dans le jardin de Monet
L’année 2018, décrétée Année Clemenceau par le président de la République, aura été l’occasion de (re) découvrir l’épistolier hors pair que fut le « Tigre », ainsi que son amour pour les arts. « Le briseur de grèves », moins dur qu’il ne le laissait paraître, se plaisait à témoigner son affection et son admiration à ses amis journalistes, politiques ou artistes. Les lettres qu’il envoyait à son meilleur ami, Claude Monet, se terminaient par un tendre « Je vous embrasse de tout mon cœur ». (…)
Sa correspondance avec le peintre est au cœur du film de François Prodromidès. Le réalisateur retrace l’histoire de leur amitié.
Au fil des témoignages d’affection et des visites qu’ils se rendent – à Giverny, mais aussi chez Clemenceau en Vendée –, le film livre une subtile réflexion sur ce qui fit leur amitié. Entier, solide, exigeant, sourcilleux parfois, leur compagnonnage se renforce au gré des épreuves qui marquent l’histoire de la IIIe République : lors de l’affaire Dreyfus, Monet rejoint Clemenceau dans son combat pour la justice ; à l’issue de la Grande Guerre, le peintre s’engage à offrir une œuvre à la République victorieuse.

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Marisa del Carmen05 novembre 2019