31 MARS 2021

Baghdad Central - Un flic dans le bourbier irakien

Dans "Baghdad Central", thriller nerveux dans l’Irak post-Saddam occupé par la coalition, l’acteur palestinien Waleed Zuaiter ("Homeland" et le film "Omar", primé à Cannes, qu’il a aussi produit) crève l’écran en flic solitaire et père aimant. Entretien. Retrouvez la série en cliquant ici.

Media

Qu’est-ce qui vous a séduit dans la série Baghdad Central ?

 

Waleed Zuaiter : Quand le rôle de Khafaji m’a été proposé, j’ai d’abord pensé refuser. Je venais de perdre mon père et je n’avais aucune envie d’incarner encore un de ces archétypes arabes des productions occidentales. Encouragé par ma femme et mon agent, j’ai malgré tout passé l’audition et aussitôt été touché par l’écriture, riche et profonde, du projet : une beauté qui incite chacun à élever le niveau de sa performance, comme le héros dépasse la simple survie pour se transcender. Au travers de ces personnages irakiens, chacun devrait pouvoir se reconnaître. C’est une série sur l’appartenance, la peur et la perte de la famille, de la maison, du pays...

 

Qui est Muhsin Kadr al-Khafaji, le policier que vous incarnez ?

Waleed Zuaiter : Inspecteur dans les services secrets sous le régime de Saddam, il a été rétrogradé après l’invasion de l’Irak par les forces de la coalition. Hier policier contraint d’obéir pour survivre, il est hanté par son passé. C’est sans doute le personnage le plus complexe que j’ai eu à jouer. Lorsque la série s’en empare, Khafaji est au plus bas, mais il surmonte les épreuves par et pour l’amour de sa famille, sentiment qui va entrer en conflit avec l’attachement qu’il éprouve pour son pays. Ses qualités résonnent avec les valeurs dans lesquelles mes parents m’ont élevé : courage, intégrité, loyauté et confiance. Quand l’Autorité de la coalition cherche à le recruter, il accepte sans illusions afin que sa fille Mrouj, atteinte d’une maladie des reins, soit prise en charge dans la “zone verte”, même si, paradoxalement, c’est elle qui prend soin de lui. Khafaji voit aussi dans cette collaboration un moyen de recueillir des informations sur la disparition de son aînée, en rupture avec lui. Rongé par la douleur de la perte de sa femme et de son fils, il n’a pu jusque-là être assez présent pour ses filles.

 

Quels souvenirs personnels gardezvous de cette période ?

Waleed Zuaiter : Palestinienne, ma famille a connu la guerre et la pauvreté, avant de devoir injustement s’exiler. Né à Sacramento, j’ai grandi au Koweït, de 5 à 19 ans. Retourné aux ÉtatsUnis pour l’université, je suis revenu au Koweït pour les fiançailles de mon frère, à la veille de l’invasion du pays par Saddam Hussein en 1990. La frontière avec l’Arabie saoudite a alors été fermée et mes parents, ma grand-mère de 93 ans et moi avons dû passer par la Jordanie : un périple qui nous a pris trois jours. C’est à ce moment-là que j’ai perdu mon innocence et commencé, je crois, à devenir adulte.

 

Propos extraits du dossier de presse de Channel Four