Dans l'ombre des contes de Grimm
Le réalisateur Christoph Hochhäusler dit s'être inspiré des contes de son enfance et résume ainsi son premier long-métrage : "C’est l’histoire d’une femme muette et d’un homme aveugle. Ils pourraient voir ou parler mais ils ont peur. Ils sont prisonniers de leur mensonge et de leur imaginaire..."
" L’origine du film est le conte des Frères Grimm “Hansel & Gretel”. Je trouve que c’est une histoire pleine de réalisme et cruelle. Dans ce conte, les enfants au courant du projet de leurs parents de les abandonner, les suivent néanmoins dans la forêt. Cette conduite paradoxale est la clé de ce conte. Nous refusons d’entendre certaines vérités quand elles menacent notre existence.
C’est l’attitude de Sylvia dans le film. Elle laisse les enfants et rentre chez elle comme si rien ne s’était passé. Comme si elle n’avait rien fait. Elle aide même son mari dans sa démarche. Ce comportement déteint sur lui car il refuse de savoir ce qui s’est vraiment passé. Il nie l’évidence. C’est l’histoire d’une femme muette et d’un homme aveugle. Ils pourraient voir ou parler mais ils ont peur. Ils sont prisonniers de leur mensonge et de leur imaginaire. Ce qui crée une solitude terrible. On s’accroche à une image pas parce qu’on y tient beaucoup mais parce qu’elle est là.
Dans la version américaine du conte, le message est “sois sage avec tes parents ou l’ogre viendra te chercher”. Dans la version originale, c’est la cellule familiale qui est le germe de la terreur.
Pour moi cela a plus de sens. Entre la belle-mère et les enfants, entre les parents et aussi entre les enfants c’est : qui est le plus aimé ? qui a quoi ? C’est un état de famine émotionnelle.
J’ai filmé en Pologne non pas que je pense que c’est un pays sans ambition mais ici, faire des plans structurés ne sert pas à grand chose. En Allemagne - moi y compris - on retient son souffle. Comme si la vie ne pouvait pas commencer avant son 1er diplôme, ou sa première maison, ou son premier film… C’est pourquoi dans le film, la maison n’est pas terminée. Dans mon enfance mes parents avaient une maison qui est restée en travaux des années. Elle demeurait ainsi pleine de promesses. Quand ils l’ont terminée, ils ont divorcé..."
Christoph Hochhäusler