Télérama - Pierre Murat: Tony Manero
" ... Raùl, lui, ne fait pas que rêver : il est prêt à tout, et même au meurtre, pour satisfaire son obsession... Il tue une vieille dame pour vendre sa télé couleur et dérobe montre et chaînette en or à un type abattu par les flics pour avoir transporté des tracts... Raul est un psychopathe dans un pays de fous. Et c'est bien ce que filme Pablo Larrain : un cinglé sans repères qui cherche une identité illusoire auprès d'un fantôme de cinéma qu'il imite tant bien que mal. A la limite, ce n'est pas tant Travolta qui intéresse Raùl. Quand la salle où il se rend chaque jour, depuis des mois, change de programme et projette Grease, sa rage le pousse à agresser le projectionniste. Non, c'est Tony Manero qui le hante, l'envahit, le possède. Lorsque l'animateur télé lui demande ce qu'il fait dans la vie, Raùl, dérisoirement vêtu de blanc, comme son idole, ne peut que balbutier : « Ça ! »... Son métier, c'est d'être Tony Manero... Raùl est Tony Manero comme Pinochet est dictateur, avec foi et sans loi... Un grand comédien de théâtre, Alfredo Castro, parvient à rendre étrangement passionnante, voire troublante, cette coquille vide, cette non-existence. Le cinéaste ne quitte pas des yeux son personnage au sang froid, qu'il se teigne les cheveux, se dérobe aux caresses de femmes énamourées ou se débarrasse des obstacles qui se dressent sur sa route. La violence surgit alors, brutale, féroce, dans cette ville tétanisée, léthargique, aux murs hauts et à l'air rare."
" ... Raùl, lui, ne fait pas que rêver : il est prêt à tout, et même au meurtre, pour satisfaire son obsession... Il tue une vieille dame pour vendre sa télé couleur et dérobe montre et chaînette en or à un type abattu par les flics pour avoir transporté des tracts... Raul est un psychopathe dans un pays de fous. Et c'est bien ce que filme Pablo Larrain : un cinglé sans repères qui cherche une identité illusoire auprès d'un fantôme de cinéma qu'il imite tant bien que mal.
A la limite, ce n'est pas tant Travolta qui intéresse Raùl. Quand la salle où il se rend chaque jour, depuis des mois, change de programme et projette Grease, sa rage le pousse à agresser le projectionniste. Non, c'est Tony Manero qui le hante, l'envahit, le possède. Lorsque l'animateur télé lui demande ce qu'il fait dans la vie, Raùl, dérisoirement vêtu de blanc, comme son idole, ne peut que balbutier : « Ça ! »... Son métier, c'est d'être Tony Manero... Raùl est Tony Manero comme Pinochet est dictateur, avec foi et sans loi...
Un grand comédien de théâtre, Alfredo Castro, parvient à rendre étrangement passionnante, voire troublante, cette coquille vide, cette non-existence. Le cinéaste ne quitte pas des yeux son personnage au sang froid, qu'il se teigne les cheveux, se dérobe aux caresses de femmes énamourées ou se débarrasse des obstacles qui se dressent sur sa route. La violence surgit alors, brutale, féroce, dans cette ville tétanisée, léthargique, aux murs hauts et à l'air rare."