Dominique Cabrera

Réalisation - Scénario

Biographie

La politique et la poésie sont au coeur de son cinéma, dans un constant balancement entre l'envie d'échappées oniriques et le besoin de se confronter à ce qu'il y a de plus concret dans nos vies : un lieu, un corps, un environnement social...

Née en 1957 à Relizane, en Algérie, installée en France depuis 1962, elle passe sa licence de lettres, puis entre à l’IDHEC. Monteuse de sujets d’actualité dans les stations régionales de FR3, elle fonde, avec Jean-Piere Thorn et Alban Poirier, une maison de production, l’Ergonaute, avec pour vocation de faire des films d’interventions syndicales ou politiques.

Elle réalise son premier court métrage de fiction, L’Art d’aimer, en 1984, suivi d’un court métrage, cette fois documentaire, Ici là-bas. Elle tourne plusieurs moyens métrages documentaires pour la télévision, et notamment Rester là-bas (1992), Chronique d’une banlieue ordinaire (1992) et Une poste à La Courneuve (1994). Son regard sur le monde actuel devient très vite une référence dans le milieu documentaire où la sensibilité restituée des personnes ne masque jamais la vision du politique. Pour Dominique Cabrera, décrire l'homme va de pair avec la description de ses conditions de vie.

Son premier long-métrage pour le cinéma est une fiction qui met face-à-face deux attitudes, complémentaires mais en conflit, sur la façon de vivre ses origines : L'Autre Côté de la mer voit ainsi Claude Brasseur et Roschdy Zem porter en eux une Algérie tout à tour fantasmée, redoutée, détestée et admirée - un pays en "couple" avec un autre, la France, et dont les enfants doivent affronter la séparation.

Dans Nadia et les hippopotames (une version courte, diffusée sur arte, s'intitule Retiens la nuit), la réalisatrice évoque les grèves de la SNCF en 1995 (le film date de 1999), tournant parmi d'authentiques cheminots. Si les évenements décrits sont précis, et le propos politique affirmé, le film n'en invite pas moins à en ressentir les vibrations intimes. Il se passe de nuit, dans le froid et la promiscuité. Alors la solidarité du groupe devient autant physique que morale.

Dans Le Lait de la tendresse humaine, le groupe se dessine en réaction à un personnage absent : une jeune mère (Marilyne Canto) qui vient d'avoir un bébé, quitte, brusquement, sans explication, le domicile conjugal. Film en points de suspensions, labyrinthe familial... avec, pour guides, des acteurs qui se dépassent : Patrick Bruel, Yolande Moreau, Olivier Gourmet, Valeria Bruni-Tedeschi...

Ce goût pour les familles d'acteurs, hors clans, se retrouve dans Folle embellie où les fidèles de la cinéaste (Marilyne Canto, Yolande Moreau, Olivier Gourmet) côtoient des nouveaux venus qu'on a l'impression de découvrir pour la première fois (Miou Miou, Jean-Pierre Léaud, Morgane Marine qui fut l'adolescent des frères Dardenne pour Le Fils). Dominique Cabrera croit en la vertu des troupes de comédiens, ici particulèrement investis d'une mission délicate : nous embarquer dans l'inconnu, au creux d'une forêt symbolique, presque magique, jouant un groupe de fous échappés de leur asile grâce à un bombardement (le scénario s'inspire d'un fait divers qui eut lieu pendant la seconde guerre mondiale).

Ces incursions au cinéma ne sont pas un aboutissement pour la réalisatrice mais le prolongement d'une réflexion et d'une relation intime entretnue avec les images. Car la cinéaste met aussi en forme, en parallèle, un journal filmé (qui fut diffusé au cinéma : Demain et encore demain) ou des courts métrages comme une série noire pour la télévision (Quand la ville mord, avec Aïssa Maiga).