Chaque année, le 15 août est au Japon une date problématique. Du moins depuis 1985, quand le Premier ministre Nakasone, en ce jour anniversaire de la capitulation et pour la première fois depuis 1945, vint s'incliner devant les soldats morts pour la patrie au sanctuaire Yakusuni, inaugurant ainsi une tradition vivement contestée à l'étranger, et au Japon même. Car dans ce bastion du conservatisme, voire du révisionnisme, on honore y compris les pires criminels de guerre, dont le général Tojo, jugés et condamnés sous l'occupation américaine au nom des millions de victimes asiatiques de l'armée japonaise entre 1937 et 1945.Quelle place tient aujourd'hui au Japon ce passé militariste ? Le pays est-il tenté de renouer avec lui ? A-t-il fait un premier pas en ce sens dès 2003, en engageant des troupes en Irak dans la coalition menée par les États-Unis ?Vingt ans après la disparition de Hirohito, le 7 janvier 1989, Kenichi Watanabe mène une enquête fouillée, nourrie d'archives et d'entretiens, pour éclairer le contexte historique et politique de cette question fondamentale, qui prend racine dans l'immédiat après-guerre.LE "DROIT À LA GUERRE". Dans les décombres de la défaite, le Japon rebâtit sa puissance économique à l'ombre de l'Amérique, promulguant notamment la constitution démocratique écrite par l'occupant, autour de deux points fondamentaux : l'article 1, sauvegardant le statut de l'empereur, désormais sans pouvoir, et par là exonéré de toute responsabilité pour les crimes de guerre du Japon impérial ; et l'article 9, qui établit le principe de non-belligérance et symbolise le renouveau moral du pays. Même si celui-ci va mettre sur pied des forces armées terrestres considérées comme la cinquième armée au monde, il ne s'agit que d'"autodéfense". Depuis le suicide spectaculaire de l'écrivain Yukio Mishima, en 1970, appelant l'armée à renouer avec son "droit à la guerre", le camp nationaliste n'a jamais baissé la garde, tandis que l'opinion reste divisée. Un débat restitué ici dans toute sa complexité.

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