Réalisation

Mathilde Damoisel

L'Europe des écrivains 

Mohandas Gandhi, icône planétaire, s'est imposé comme l'un des leaders de la non-violence et le symbole de l’indépendance de l’Inde. Quelles ont été les stratégies de Gandhi pour incarner cette lutte ? Comment a-t-il fait de son propre corps (qu'il n'hésita pas à mettre en scène et en danger au travers de grèves de la faim) et de son image les armes majeures d’une guerre de communication mondiale, en Inde, en Europe et jusqu’aux États-Unis ? Enquête sur ce qui perdure aujourd’hui du mythe Gandhi, ce qu’il continue à inspirer, ses échecs et la façon dont, finalement, il a été trahi.

Gandhi, de l'homme à l'icône

En cinq ans, au P&eacute;rou, plus de 300 000 femmes et pr&egrave;s de 30 000 hommes ont &eacute;t&eacute; st&eacute;rilis&eacute;s de force par le gouvernement d&#39;Alberto Fujimori, soutenu par les instances internationales. Au nom de la lutte contre la pauvret&eacute;, les Indiennes quechua en ont &eacute;t&eacute; les premi&egrave;res victimes. &quot;Ils ne m&#39;ont rien demand&eacute;... Ils m&#39;ont emmen&eacute;e comme un animal dans la salle d&#39;op&eacute;ration&quot;, t&eacute;moigne Yoni. Comme des milliers d&#39;autres femmes, ses trompes ont &eacute;t&eacute; ligatur&eacute;es de mani&egrave;re irr&eacute;versible dans des conditions dangereuses. Nombreuses sont celles qui sont mortes des suites de leur st&eacute;rilisation ou qui lui doivent, aujourd&#39;hui encore, de lourdes s&eacute;quelles.

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Responsabilit&eacute; internationale

Ce documentaire d&#39;investigation donne en priorit&eacute; la parole aux victimes. Face &agrave; la cam&eacute;ra, elles t&eacute;moignent avec dignit&eacute; de la brutalit&eacute; de l&#39;op&eacute;ration impos&eacute;e qui a boulevers&eacute; leur vie. Autour de ce choeur de femmes, le film resitue le cas du P&eacute;rou dans une histoire globale du contr&ocirc;le des naissances. Il met en lumi&egrave;re le r&ocirc;le fondamental de la Banque mondiale, des Nations unies et de l&#39;USAID (l&#39;agence am&eacute;ricaine d&#39;aide au d&eacute;veloppement) qui l&#39;ont &eacute;rig&eacute; en instrument de lutte contre la surpopulation, f&ucirc;t-ce au prix de milliers d&#39;existences bris&eacute;es. Si le cas des 8 millions d&#39;Indiens st&eacute;rilis&eacute;s de force sous Indira Gandhi, dans les ann&eacute;es 1970, a &eacute;t&eacute; d&eacute;nonc&eacute; depuis comme un immense abus de pouvoir, la trag&eacute;die des femmes p&eacute;ruviennes &eacute;tait jusqu&#39;ici rest&eacute;e dans l&#39;ombre

Le Ventre des femmes

Sur ce simple fruit s&rsquo;est b&acirc;ti un empire. Raconter l&#39;&eacute;pop&eacute;e &eacute;difiante de la banane, entre l&#39;Am&eacute;rique centrale et les &Eacute;tats-Unis, c&#39;est revenir aux sources d&#39;un mod&egrave;le plus que jamais d&rsquo;actualit&eacute; &ndash; un capitalisme se jouant des fronti&egrave;res et des lois nationales pour assurer &agrave; ses actionnaires des profits maximaux, jusqu&rsquo;&agrave; menacer la d&eacute;mocratie. Quand elle appara&icirc;t au tournant du XXe si&egrave;cle sur le march&eacute; nord-am&eacute;ricain, la banane, denr&eacute;e rare et ch&egrave;re, est r&eacute;serv&eacute;e &agrave; une &eacute;lite ais&eacute;e. Minor Cooper Keith, entrepreneur visionnaire et dur en affaires, va faire d&#39;elle un produit de consommation populaire, sur lequel il &eacute;difiera la premi&egrave;re multinationale au monde. B&acirc;tisseur du chemin de fer costaricain, il promet au lendemain de la Premi&egrave;re Guerre mondiale aux jeunes nations d&#39;Am&eacute;rique centrale un d&eacute;veloppement bas&eacute; sur la monoculture et l&#39;exportation de la banane, en &eacute;change de terres achet&eacute;es &agrave; vil prix, souvent confisqu&eacute;es aux petits paysans indiens, de l&#39;usage gratuit des lignes ferroviaires qu&#39;il construit et d&#39;une quasi-exemption d&#39;imp&ocirc;ts. 
 
&quot;Le Poulpe&quot; 
N&eacute;e en 1899, l&#39;United Fruit Company (UFC) constitue trente ans plus tard une puissance r&eacute;gionale incontest&eacute;e, &eacute;dictant ses propres lois sur d&#39;immenses plantations qui s&#39;&eacute;tendent jusqu&#39;en Colombie. &quot;Le Poulpe&quot;, comme on la surnomme, fait venir de Jama&iuml;que une main-d&#39;&oelig;uvre corv&eacute;able &agrave; merci, pourchasse les syndicalistes et fait pression sur les gouvernements des r&eacute;publiques &quot;banani&egrave;res&quot;. Quand, en 1933, quatre ans apr&egrave;s la mort de Keith, un self-made-man n&eacute; en Moldavie, Samuel Zemurray, alias &quot;le tsar de la banane&quot;, reprend les r&ecirc;nes du mastodonte, il amplifie ces m&eacute;thodes, notamment gr&acirc;ce aux services du p&egrave;re des spin doctors Edward Bernays. En 1954, avec l&#39;appui du gouvernement Eisenhower, tous deux chasseront du pouvoir au Guatemala le social-d&eacute;mocrate Jacobo &Aacute;rbenz Guzm&aacute;n, coupable d&#39;avoir nationalis&eacute; pour sa r&eacute;forme agraire des milliers d&#39;hectares de l&#39;UFC. La guerre civile d&eacute;clench&eacute;e alors fera plus de cent mille morts jusqu&#39;en 1996&hellip; 
Les multinationales d&#39;aujourd&#39;hui ont repris les pratiques inaugur&eacute;es par l&#39;UFC en Am&eacute;rique latine&nbsp;: int&eacute;gration verticale, poursuite du monopole, privatisation des ressources, &eacute;vitement fiscal. La monoculture intensive d&#39;un produit d&#39;exportation, qui &eacute;puise les sols et empoisonne les travailleurs, reste elle aussi en vigueur dans une grande partie du monde. Gr&acirc;ce &agrave; un montage d&rsquo;archives rares, le film retrace pr&egrave;s d&#39;un si&egrave;cle de r&egrave;gne sans partage. Des sp&eacute;cialistes (Geoffrey Jones, historien des multinationales &agrave; la Harvard Business School, Ga&euml;l Giraud, &eacute;conomiste &agrave; l&rsquo;Agence fran&ccedil;aise pour le d&eacute;veloppement, et la philosophe C&eacute;cile Renouard, enseignante &agrave; l&rsquo;Essec) commentent cette histoire &eacute;difiante et en partie oubli&eacute;e, illustration &eacute;clairante des d&eacute;rives du capitalisme.

La loi de la banane

La Fin des Ottomans

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Mathilde Damoisel

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